Dans le jardin [Númendor]

L'hiver commençait à laisser quelques petites places au printemps, la douceur revenant petit à petit sur les Terres Eternelles.
Mais il n'était pas encore tant de se découvrir, et le gros manteau hivernal était toujours de vigueur, malgré ce merveilleux soleil et ce ciel dégagé...d'un bleu azur.

Et dans les jardins du château se promenait une jeune femme à l'allure lente et gracieuse, emmitouflée dans une longue cape d'une laine noire, suivit par un majestueux étalon blanc, complètement nu de tout harnachements.
Les longs et soyeux cheveux couleurs ébènes de la demoiselle étaient soigneusement coiffés, nattés, attachés...donnant au final une coiffure complexe mais merveilleusement belle.
On pouvait deviner qu'elle tenait quelque chose dans ses bras, très certainement un enfant, un tout petit enfant.

Et cette supposition était totalement vraie, car l'Elfe n'était autre qu'Eleanor, et le bébé n'était autre que la petite princesse Tanaë.

Bercée par le son mélodieux, suave, d'une berceuse que chantait sa mère, elle c'était endormie sagement dans ses bras.
La guerrière, elle, ne s'arrêta pas de chanter, continuant sa ballade entre les arbres dénudés.

En la regardant, là, à cet instant, sans connaître son histoire, on pourrait penser que cette femme est heureuse...pourtant, les apparences ne sont que trompeuses....
Car depuis l'épisode du messager envoyé par Envir, la fille du roi des Elfes ne pense que par la tristesse et la souffrance.
Une tristesse et une souffrance qui bientôt se transformeront en une vengeance...mais pour l'instant, nous n'en sommes pas là.

Continuant de marcher en compagnie de son fidèle destrier, Asphalet, elle s'arrêta et s'assit sur un banc de pierre blanche, balayant d'un doux regard le paysage qui s'offrait à elle....Un doux regard qui cache en fait, ancrer bien au fond de ses yeux, une pointe de désarroi, de douleur...
Et cela s'accompagnait avec un visage légèrement creusé et enlaidit par la fatigue et la maladie.
Oui, Eleanor était malade, une maladie dut certainement à sa peine, à la fatigue de l'accouchement...une maladie pesante avec souvent quelques malaises..

Un bruit de pas, de course plutôt, résonna dans les jardins. Courant sur la neige qui commençait à fondre, un petit garçon, sûrement un jeune messager, se dirigea vers la princesse des elfes.

" Ma.. Majesté ! Majesté ! "

Le petit elfe stoppa en dérapage incontrôlé a coté de la jeune femme et s'écrasa sur les fesses.

" AAAAAAaaaaaaaaaaaaaaiiiiieeeeeeeeuuuuuuuh ! " Se plaignit-il bruyamment.

Vêtu d'une courte tunique brune et de chausse qui remontait jusqu'au cuisses, le blason des Terres Eternelles était apposé à l'emplacement de son cœur.
Oubliant de nouveau toute réserve, il se releva brusquement et tirailla un peu le bas de la robe d'Eleanor. Il ne devait pas avoir plus de 6 ans en âge humain et il était haut comme 3 pommes.
Se mélangent encore dans les titres, le garçonnet balbutia à toute vitesse, surexcité :

" M'dame ! eeuuuh nan, Capi.. nan c'est pas ca non plus ... PRINCESSE ! Maj'sté ! "

Visiblement, il n'avait pas remarqué le bébé qui dormait dans les bras de la fille d'Endwil. A la limite, vu sa taille, ce n'était pas étonnant.

" Ils... ils ... "

Il n'eut pas le temps de délivrer son message que ceux qu'il devait annoncer arrivait.

Un garde vêtu de la livrée des elfes et portant une longue lance a l'air redoutable s'approcha avec une expression neutre et impassible à rendre jalouse une statue.
D'une démarche martiale, il s'approcha de la princesse et s'inclina devant elle.

" Dame Eleanor..."

Le soldat se releva lentement. Un peu plus grand que la femme, son attitude était pleine de déférence pour la demoiselle.

" Un étranger souhaiterait vous-voir. Doit-on le faire amener ? "

Le gamin se mit à tirailler le pantalon du garde d'un air insistant. Sa mine était faussement sérieuse et on sentait qu'il allait réclamer quelque chose.

" Eh, eh, eh ! Et ma pièce ? "

Evidement, sa course n'avait pas été désintéressée. L'homme soupira en levant les yeux au ciel puis se baissa et posa une pièce d'or dans la petite paume de l'enfant qui eut un sourire qui lui allait jusqu'au oreilles puis fila.
Le soldat se redressa avec l'air de dire 'aaah ! Les enfants de nos jours...'. Mais il se retenait par égard pour la dame qui serrait contre elle ... un enfant justement.
Il attendait la réponse de la princesse, immobile.

La princesse arrêta sa douce berceuse, interrompu par les cries d'un petit enfant, qui l'appelait de vive voix.
Intriguée, elle posa un regard étonné sur lui _ qui arrivait au pas de course _. Quelque chose était-il arrivé au château ? A son père ?
Et son inquiétude se renforça, voyant sur la tunique du très jeune messager le blason royal.

Mais ses expressions partirent bien vite, pour laisser place à un visage amusé et joyeux, voyant le garçon tomber malencontreusement.
Posant sa main sur sa bouche, elle se retenait de rire, pourtant, quelques gloussements ne purent que lui échapper, même s'ils furent étouffés au fond de sa gorge.

S'apprêtant à lui demander s'il ne c'était point fait trop mal, et étant prête à l'aider à se révéler, celui-ci se remit sur ses jambes d'un bond et commença à tirer le bas de sa belle robe, voulant apparemment lui dire quelque chose d'important.

Le ton redevenant sérieux, Eleanor se crispa légèrement...Ils ? Mais qui ils ?
Ne comprenant mot à ce qu'il balbutiait, elle voulut l'inciter à ce calmer et à continuer, lorsqu'Asphalet l'interrompit.
Renâclant, il plaqua très légèrement ses oreilles, voyant le garde arriver.

La princesse détourna alors son regard rassurant de l'enfant pour le poser sur cet homme qui approchait.
D'un sens rassurée de voir que rien de grave n'était arrivée, elle reprit un air solennel, et inclina très légèrement sa tête quand l'Elfe la salua.
L'écoutant avec attention, elle fut plutôt surprise par sa question... Un étranger ? Mais qui ?
Ses yeux se baissèrent quelques instants, regardant sa fille, endormie paisiblement.
Il serait presque risqué qu'elle accepte que cet inconnu vienne...pour la simple raison qu'il verrait la jeune princesse.
Voulant chercher demander conseils à son fidèle destrier, la jeune guerrière ne posa qu'un regard plein de question pour que celui-ci comprenne.
Apparemment perplexe, il lui fit comprendre que cet étranger pouvait être important et qu'il ne fallait refuser, même s'il y a risque.

Prenant donc conseil, Eleanor dirigea une nouvelle fois son attention vers le garde.
Hésitant quelque peu, elle finit par prendre la parole d'un ton légèrement incertain :

-Oui, amenez-le.

A ce moment, dans sa tête se bousculèrent maintes et maintes questions sur cet inconnu, sur son identité, sur le sujet de sa venue...
Pourtant, malgré son air soucieux, elle ne put retenir un léger sourire amusé à la demande du petit garçon...^^ Et ce sourire s'adressa aussi quelque peu à l'homme, comprenant très bien se soupir...même s'il n'avait dit sa phrase, il l'avait pensé si fort que la princesse put l'entendre